Comprendre les violences psychologiques et briser le cercle vicieux quand on en est victime : un travail qui ne se fait pas seul

briser violences psychologiques pas tout seul

Crédit illustration : freepik.com

 

Être victime de violence psychologique, c’est être privé de sa capacité à être adulte

Dans son livre Les prisons familiales (Comprendre et agir), Anne-Laure Buffet rappelle que, dans le cadre de violences psychologiques, notamment dans un couple, être adulte est une posture psychique qui semble inaccessible aux victimes.

En effet, les victimes de violence psychologique se croient incompétentes (parce qu’elles ont été rendues incompétentes par la personne autrice des violences psychologiques).

Anne-Laure Buffet définit le « être adulte » comme un état qui rend responsable en acceptant les épreuves, en se réjouissant des réussites, en affrontant les échecs, en se remettant en cause si nécessaire, en refusant d’être de nouveau utilisé ou dénigré.

Ainsi, « être adulte » permet de faire des choix, de déterminer des objectifs, de penser à aujourd’hui mais aussi à demain, de construire son avenir sans se couper du présent, de développer des ressources, des compétences et évidemment des limites personnelles.

Pour autant, « être adulte » n’interdit pas les rêves, les aspirations profondes, la joie et le rire. Un adulte a le droit au rêve et à l’élaboration de projets tout en sachant évaluer lesquels seront réalisables et lesquels resteront de l’ordre du rêve.

Accepter sa part de responsabilité dans une relation dysfonctionnelle

« Être adulte », c’est aussi accepter sa part de responsabilité dans une relation dysfonctionnelle. Cette étape est éminemment douloureuse.

Quand une personne est victime de violence psychologique, elle est infantilisée et ne distingue pas la culpabilité de la responsabilité. Anne-Laure Buffet estime que la responsabilité implique de mettre en œuvre ce qui est nécessaire pour élaborer de nouveaux schémas et des nouvelles croyances bonnes pour soi.

Cette responsabilité amène, à terme, la rupture d’avec “l’emprisonneur” (l’auteur ou l’autrice de violence psychologique). Mais la difficulté réside aussi dans le fait de reconnaître avoir interagi dans cette relation et de se demander à quelles fragilités personnelles le processus de violence psychologique répondait.

Il y a alors rupture avec une autorité désorganisée et contraignante afin d’en instaurer une nouvelle, la sienne vis-à-vis de soi-même, avec bienveillance et sans complaisance. – Anne-Laure Buffet

 

Un difficile chemin vers le « être adulte » après des violences psychologiques

Surmonter les peurs et les freins en douceur

Quand elle s’engage sur le chemin du devenir adulte, la victime de violence psychologique apprend progressivement à vivre autrement en se connectant à ses émotions propres, ses limites personnelles, ses besoins fondamentaux, sa dignité incontestable et ses droits humains inaliénables.

Cela amène à désobéir à l’auteur des violences mais lui désobéir revient à le trahir. La victime en chemin vers le « être adulte » se croit alors coupable de faire ce qui a toujours été interdit, a honte de penser par elle-même sans en référer à l’emprisonneur, et a peur de ses propres décisions.

Se positionner est loin d’être simple, la perte de repères angoisse et peut freiner la thérapie et la reconstruction. La victime doit différencier ce qui lui appartient fondamentalement de ce qui ne lui appartient pas. Et pour cela il lui est nécessaire de se confronter à elle-même, de nommer ses peurs et ses hontes pour s’en libérer. – Anne-Laure Buffet

De nombreuses peurs freinent les victimes, sans qu’elles en soient pleinement conscientes :

  • la peur de devoir affronter l’autre dans une séparation violente lors de procédures juridiques,
  • la peur d’avoir tort, d’être de nouveau critiquée, de ne pas être crue, de se laisser embarquer à nouveau des les culpabilisations de l’autre,
  • la peur de se retrouver seule,
  • la peur de la séparation d’avec les enfants…

La reconstruction est donc très difficile (pour ne pas dire impossible) à mener seul suite à la violence psychologique.

Un chemin qui ne s’emprunte pas dans la solitude

Anne-Laure Buffet estime que quitter une relation violente et se reconstruire seul(e) est difficile et peut être dangereux.

La reconstruction peut passer par des soutiens éclairés et lucides (famille, amis, associations, groupes de parole…), par un nouvel amour authentique dans un couple solide et/ou par une thérapie.

Cette reconstruction passe nécessairement par un deuil qu’Anne-Laure Buffet définit comme une phase de renonciation à des modèles de pensée, des convictions, des certitudes. C’est une adaptation psychologique et un cheminement émotionnel et psychique, puisqu’il amène à une rupture et à une modification radicale.

L’objectif de la thérapie est de mettre fin à l’emprise et de supprimer les fausses croyances à travers la reconnexion aux émotions jusque-là perçues comme interdites ou perçues comme dangereuses. La thérapie permet à la victime de devenir une personne libre et autonome, capable de penser à elle pour mieux penser aux autres.

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Source : Les prisons familiales (Comprendre et agir) de Anne-Laure Buffet (éditions Eyrolles). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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