Comprendre la dépendance affective problématique

dépendance affective

Le rôle bénéfique de la dépendance affective

Dans son livre S’affranchir des dépendances affectives, Brigitte Allain-Dupré définit la dépendance adulte comme problématique quand cette dépendance s’organise dans la vie relationnelle autour d’un besoin qui prend le pouvoir sur le sentiment qui n’est plus gratuit.

La dépendance affective est inhérente à la nature humaine car c’est la manière qu’a un bébé pour établir un lien solide de confiance avec son entourage. Mais la dépendance peut dérayer quand elle sert l’asservissement des uns par rapport aux autres, les empêchant de jouir de la liberté d’être soi.

Ainsi, Brigitte Allain-Dupré rappelle que la dépendance affective est vitale aux bébés et aux jeunes enfants pour leur survie mais qu’elle doit progressivement faire place, de la part des parents, à une autonomie et une différenciation adaptée à l’âge des enfants, des adolescents et enfin des adultes qu’ils sont devenus. Les jeunes humains ont un besoin vital de proximité relationnelle car c’est le fondement de l’autonomie et des apprentissages. Quand un enfant ne se sent pas suffisamment en confiance, il est moins disponible pour explorer avec curiosité et confiance (en lui, dans les autres et dans la vie).

Rebecca Shankland, professeure des Universités en psychologie du développement, explique que la dépendance affective est problématique quand elle est marquée par une forme de soumission à l’autre et l’impression que sans l’autre, et notamment sans l’approbation de l’autre, on n’est plus rien. À l’inverse, la relation d’attachement constructif offre une base de sécurité à partir de laquelle on peut se construire librement, sans chercher nécessairement à plaire ou à correspondre aux exigences d’autrui. La relation de confiance permet de faire émerger le meilleur de chacun, tandis que la dépendance affective entraîne un niveau élevé d’angoisse qui ne permet pas un fonctionnement optimal de la personne. Ses compétences et ses ressources s’en trouvent amoindries, augmentant encore davantage son sentiment de dépendance à l’autre.

La dépendance devient problématique quand elle dévie de la gratuité du sentiment. S’il n’y a plus d’échange, mais des “stratégies inconscientes de troc” (expression de Brigitte Allain-Dupré), alors il y a pathologie de la relation entre adultes (que ce soit en couple, dans la relation parents/ enfants ou toute autre relation). La dépendance peut même devenir persécution quand la personne qui apporte du soin estime que la personne soutenue n’est pas assez reconnaissante. Il y a prise de pouvoir sur l’autre qui est objectivé et utilisé dans un rapport de dépendance.

Pour Brigitte Allain-Dupré, la dépendance exprime l’inachevé du développement psychologique. C’est la raison pour laquelle une réflexion sur cette relation de dépendance peut nous aider à faire évoluer notre position intérieure, c’est-à-dire nous aider à grandir à partir de notre immaturité reconnue et acceptée, simplement.

De la dépendance affective inhérente à la nature humaine à la dépendance génératrice de souffrance

La dépendance affective devient problématique sous plusieurs formes :

  • quand une personne donne aux autres le pouvoir de définir sa propre valeur;
  • quand une personne se fait une obsession de contrôler le comportement d’une autre personne en souffrance. Cette autre personne peut être un enfant, un adulte, un amant, un conjoint, un frère ou une soeur, un parent ou un grand parent, un patient, un ami…

Cette “démarche obsédante, dominatrice, obsessionnelle visant à aider, jouer sans cesse les nounous, les gardes-malades” (expression de Melody Beattie) est désignée par le terme de “codépendance”. La codépendance est marquée par une préoccupation lancinante de l’autre.

Des groupes variés peuvent être touchés par la codépendance :

  • les ex-enfants d’alcooliques ou souffrant d’autres types de dysfonctionnement (dépression, dépendance aux jeux ou autres addictions, boulimie, anorexie…)
  • les proches de malades chroniques ou de personnes atteintes de troubles affectifs et mentaux,
  • les parents d’enfants souffrant de troubles du comportement,
  • des professionnels du soin et de l’aide (infirmiers, assistantes sociales, thérapeutes…).

Tant qu’une personne n’a pas pris conscience de sa codépendance, elle peut mettre fin à une relation avec une personne dysfonctionnelle mais risque de reproduire ses comportements de codépendance dans une nouvelle relation.

Melody Beattie rappelle que le problème n’est pas l’autre mais réside dans la façon dont le codépendant se laisse affecter par le comportement des autres et dans les voies qu’empruntent les tentatives de prise de contrôle des codépendants sur les autres. Les codépendants s’attachent solidement au besoin que les autres ont d’eux… quitte à s’en rendre malades et à en vouloir aux autres de les mettre dans cet état.

Codépendance : il y a problème quand il y a souffrance

La codépendance affective n’est pas un mal en soi parce qu’elle est la manifestation de l’empathie humaine et les codépendants commettent de bonnes actions (soins, défense des droits des opprimés, aide…).

Cependant, la codépendance peut poser plusieurs problèmes quand il y a souffrance :

  • les codépendants ont l’impression de ne jamais en faire assez et éprouvent une grande culpabilité,
  • les codépendants ont tendance à s’entourer de malades/ personnes malheureuses “à sauver” pour (tenter de) parvenir au bonheur par des chemins malsains,
  • les codépendants se donnent un mal fou pour ne pas blesser les autres, pour les sauver et, ce faisant, se blessent eux-mêmes (isolement, risque d’épuisement, dépression, tendance suicidaire),
  • les codépendants finissent par éprouver de la haine envers les personnes qu’ils veulent aider parce qu’ils considèrent que ces personnes ne font pas leur part, n’écoutent pas les conseils prodigués.

Si votre préoccupation tourne à l’obsession, si de simple témoin compatissant vous êtes devenu un ou une garde malade; si vous prenez soin des autres sans prendre soin de vous-même… alors la codépendance vous crée sans doute des ennuis. Chacun doit chercher seul à savoir si sa codépendance est problématique. Chacun doit décider seul de ce qu’il va falloir changer et du moment où doit intervenir ce changement. – Melody Beattie

Origines et caractéristiques de la dépendance problématique

Les origines de la dépendance affective et de la codépendance 

Quand un humain a vécu des situations de détresse dans son enfance sans être apaisé, il a pu les emmagasiner en mémoire implicite et associer la solitude à un stress intense, presque une menace de mort. Cet état de stress peut ressurgir dans les situations de solitude, même à l’âge adulte, sans que la personne n’en ait le souvenir conscient. Cela explique des sensations de profonde détresse associée à la solitude, apparemment sans raison. Quand les besoins de protection et de réconfort n’ont pas été satisfaits dans l’enfance alors même que les humains sont programmés pour cela, un humain n’a d’autre choix que de développer des organisations psychologiques déviantes ou des troubles mentaux et des conduites qui ont pour but biologique d’assurer sa protection et sa survie à terme. Ainsi, certaines personnes ne peuvent pas supporter la solitude et ne savent pas s’attacher à des personnes sur des bases saines (mais sursollicitent l’entourage, attendent d’être sauvées ou s’attellent à sauver des personnes estimées en souffrance).

La codépendance peut trouver ses sources dans divers origines :

  • des comportements de codépendance appris dans l’enfance (aimer, ce serait anticiper les besoins de l’autre; on ne pourrait pas être aimé sans s’effacer et se mettre au service de l’autre);
  • des comportements de codépendance appris plus tard par nécessité (pour se protéger ou se sentir admis dans un groupe par exemple);
  • une interprétation de textes lus (religieux notamment).

Un point commun des codépendants semble être une enfance en contact avec un parent malade/ vulnérable (alcoolique, dépressif, violent, dépendance de toute nature type dépendance au jeu…) et d’avoir souffert de négligence, voire de maltraitance.

Avoir trop besoin des gens peut être source de problèmes. Les autres deviennent la clef de notre bonheur. Je crois que cette concentration sur les autres, cette vie où tout tourne autour d’eux, va de pair avec la codépendance et naît de l’insécurité affective, ainsi que la quête constante de l’approbation à laquelle nous nous laissons aller. La solution est en eux, et non en nous, voilà ce dont nous sommes convaincus. Même chose pour les bons sentiments : moins nous en trouvons en nous, plus nous en cherchons chez les autres. Ce sont eux qui ont tout et nous rien. Notre existence à nous ne compte pas. On nous a si souvent abandonnés, négligés, que maintenant nous nous abandonnons nous-mêmes. – Melody Beattie

Quelques caractéristiques des codépendants

Melody Beattie listes quelques tendances des codépendants (liste non exhaustive) :

  • investissement personnel (les codépendants se sentent responsables du destin des autres; ils se sentent contraints de résoudre les problèmes des autres même quand les autres ne leur ont pas demandé d’aide; ils se fâchent quand leur sollicitude restent sans effet; ils endossent plus que ce qui leur incombent)

 

  • mauvaise opinion de soi (les codépendants s’accusent toujours de tout; ils refusent les compliments mais souffrent en parallèle de l’absence de compliments; ils craignent d’être rejetés; ils ont peur des erreurs et de l’échec)

 

  • refoulement (les codépendants repoussent leurs pensées et émotions en dehors de leur champ de conscience à cause de leur peur et de leur culpabilité; ils finissent par craindre de s’autoriser à être ce qu’ils sont)

 

  • obsessions (les codépendants pensent beaucoup aux autres; ils ont des insomnies fréquentes; ils dirigent toute leur énergie vers les autres et leurs problèmes; ils essayent de prendre les autres en flagrant délit de mauvaise conduite)

 

  • attitude dominatrice (les codépendants ont côtoyé des personnes qui leur ont fait du mal et les ont déçus; ils finissent par craindre de laisse les autres être ce qu’ils sont et les événements survenir de manière naturelle; ils se croient mieux placés que les autres pour savoir la tournure que devraient prendre les choses et le comportement que devraient adopter les gens)

 

  • dénégation (les codépendants s’affairent en permanence pour ne pas avoir le loisir de réfléchir; ils s’embrouillent et font des dépressions; ils se demandent pourquoi ils ont l’impression de devenir fous)

 

  • dépendance (les codépendants ne se sentent ni heureux, ni satisfaits ni en paix avec eux-mêmes; ils croient que les autres ne les aiment pas ou ne peuvent pas les aimer; ils recherchent désespérément l’amour et l’approbation; ils rechercher souvent l’amour auprès de personnes incapables d’en donner; ils mangent trop)

 

  • problèmes de communication (les codépendants font des reproches, supplient, soudoient, donnent des conseils; ils pèsent soigneusement leurs mots afin d’obtenir l’effet désiré; ils mentent pour protéger les autres et se protéger; ils adoptent des comportements parfois infantiles et immatures)

 

  • colère (les codépendants pensent que ce sont les autres qui les font enrager; se sentent dominés par la colère des autres; ils ont peur de leur propre colère mais présentent de violents accès de mauvaise humeur; ils éprouvent de plus en plus de rancune et d’amertume; ils se demandent s’ils réussiront jamais à ne plus être en colère)

 

  • escalade (les codépendants se sentent déprimés, s’isolent, se sentent impuissants et désemparés, tombent malades, ont des idées de suicide)

 

Que les codépendants aient l’air fragiles et impuissants ou solides et plein de ressources, ce n’en sont pas moins des enfants craintifs, vulnérables et sans cesse en demande, avec un besoin déchirant d’amour et d’attention. – Melody BEATTIE

Un point commun de toutes les relations de dépendances affectives problématiques est l’absence de gratuité des sentiments (cette gratuité n’est alors plus le moteur de la relation). Les relations de dépendance affectives problématiques se caractérisent par le fait qu’un besoin prenne le pouvoir sur un sentiment gratuit.

7 caractéristiques de la dépendance affective problématique dans un couple

Brigitte Allain-Dupré cite 7 caractéristiques de la dépendance affective problématique dans un couple.

  • 1.Absence de gratuité des sentiments

Les relations de dépendance affectives problématiques se caractérisent par le fait qu’un besoin prenne le pouvoir sur un sentiment gratuit.

  • 2.Tendance irrépressible à vérifier la disponibilité de l’autre

Brigitte Allain-Dupré estime que tout se passe alors comme si la présence de l’autre n’était pas suffisamment ancrée en soi et qu’une puissante angoisse exigeait de vérifier sa permanence et sa disponibilité.

  • 3.Absence de liberté personnelle

La liberté de dire oui ou non n’a pas sa place dans la relation de dépendance.

  • 4.Une relation en miroir, privant l’autre de son individualité 

Pour certains, le partenaire dans la relation est supposé incarner une partie forte, celle qui saurait résoudre tous les problèmes; pour d’autres, il peut aussi incarner une partie sensible qui permet à la partie fragile de recevoir les bénéfices dont elle a besoin : « on m’aime, on s’occupe de moi ».

  • 5.Un rapport de complémentarité

La relation de codépendance dans le couple porte des points communs avec les relations qui lient les jeunes enfants avec leurs parents dans le sens où le bébé a besoin d’une présence parentale inconditionnelle pour survivre. La différence est qu’un bébé a toute légitimité pour prendre le pouvoir sur ses parents via des manifestations d’attachement (pleurs, rapprochement physique, demande d’attention…) pour qu’ils s’occupent de lui, ce n’est pas le cas des adultes sur d’autres adultes.

  • 6.L’asservissement

L’asservissement empêche de jouir de la vraie liberté car un partenaire anticipe, prend en charge, conseille l’autre partenaire sans être sollicité (et continue même quand ce dernier dit stop).

  • 7.Dépendance à la non-dépendance

Certaines personnes craignent tellement d’établir un lien qui les emprisonnerait ou les ferait souffrir qu’elles se convainquent qu’elles sont capables de vivre sans personne, dans un détachement et une solitude supposés choisis. Cette “phobie de la dépendance” traduit une croyance sur les relations affectives qui ne pourraient être que négatives, hostiles, portées par des prédateurs ou des persécuteurs, niant la beauté et la bonté d’une relation à un autre vécue dans la gratuité des sentiments et une dépendance choisie, consciente et saine (entraide, chaleur, réajustement quand l’un ou l’autre exprime ses besoins ou limites personnelles).

Dépasser la souffrance liée à la dépendance affective

La dépendance vue comme une maturation à poursuivre et une opportunité de développement (personnel et relationnel) 

Tous les humains sont mus par deux forces innées complémentaires :

  • l’attachement (la capacité des bébés totalement dépendants à former des liens dès la naissance pour assurer leur survie),
  • l’individuation (à travers la différenciation et le processus d’autonomisation, c’est-à-dire la possibilité de dire non, d’affirmer des limites personnelles, d’avoir des goûts et centres d’intérêt propres, de ressentir et exprimer des émotions individuelles).

Dans le cas de dépendances affectives problématiques à l’âge adulte, les forces d’attachement ne sont pas parvenues à s’allier aux forces de différenciation au cours de la construction de la personne. En instaurant une position de dépendance à l’autre, les personnes dépendantes montrent qu’elles n’ont pas les outils pour faire autrement.

Chacun peut grandir à partir de cette immaturité reconnue et acceptée qu’est la dépendance affective puisque cette dernière exprime l’inachevé du développement psychologique. La première étape du changement est la prise de conscience des mécanismes de la dépendance et de la souffrance liée à ce fonctionnement humain. La deuxième est l’acceptation de prendre soin de soi.

En effet, ce qui n’a pas pu se développer en nous pour des raisons qui nous dépassent, alors que nous sommes devenus adultes, peut être remis en chantier dans notre monde intérieur. Il ne s’agirait pas tant de simplement comprendre « pourquoi » nous sommes comme ci ou comme ça, mais bien plus de mettre en œuvre les forces de transformation inutilisées qui sont restées en jachère dans notre psyché profonde. – Brigitte Allain-Dupré

Le processus de connaissance de soi nécessite d’accepter le silence et la solitude, comme condition du dialogue avec ce que les événements, les rencontres ou les lectures éveillent en nous. Ce processus de reconnexion à soi s’inscrit dans des apprentissages nouveaux, pas à pas :

6 points importants pour comprendre les dépendances affectives problématiques et s’en affranchir

Pour nous libérer de la dépendance affective problématique, Brigitte Allain-Dupré insiste sur plusieurs points importants :

  • 1.S’engager dans un processus (parfois douloureux) d’individuation

L’individuation est un processus processus naturel auquel nous sommes tous invités. Le « deviens qui tu es » met l’accent sur la nécessité de se différencier des influences collectives et familiales pour assumer, c’est-à-dire mieux connaître, les forces et les faiblesses de notre personnalité. Ce processus nécessite d’accepter le silence et la solitude qui permettent de rentrer en contact avec la force et la beauté de notre intériorité la plus intime.

Pour aller plus loin  : Aimer son Enfant intérieur seul avec soi-même (et apprendre à supporter et aimer la solitude)

  • 2.Prendre la mesure de nos qualités et ressources psychologiques propres

C’est seulement à partir du moment où nous sommes capables de prendre la mesure de nos qualités et ressources psychologiques propres et de récupérer les énergies psychiques que nous prêtions aux autres, que nous pourrons enfin être suffisamment assurer de notre propre valeur en tant que personne. C’est ce processus qui pourra nous mener vers la possibilité de revendiquer un quelconque droit à penser, à ressentir et à désirer pour nous-même.

Lire aussi : L’estime de soi chez les adultes : comment la retrouver ?

  • 3.Questionner notre rapport au couple, à la relation amoureuse

Parfois, entre deux partenaires se noue une conjonction d’opposé au plan inconscient : ce dont chacun croit manquer, il le retrouve dans l’autre. Parfois, l’un (ou les deux) partenaire demande reconnaissance à l’autre, comme s’il ne savait/pouvait pas s’en saisir lui-même. Parfois, l’un (ou les deux) partenaire se met en position d’objet, à la fois pour avoir la paix et/ou pour ne rien ressentir, c’est-à-dire pour ne pas souffrir

Lire aussi : Comment éviter d’entrer dans un triangle dramatique (et de jouer des jeux psychologiques dangereux) ?

  • 4.Réfléchir à des questions existentielles sur nos blessures
    • Considérons-nous que nous avons besoin d’être sauvés ? De quoi ? De quelle blessure ? De qui ?
    • Par qui ? Qu’est-ce qui nous empêche d’être sauvé par nous-même ?
    • Comment formuler nos besoins de réparation le plus clairement possible pour les prendre nous-même en charge ?
    • Où trouver des personnes émotionnellement et relationnellement saines pour appuyer cette démarche ?
  • 5.Prendre le temps de faire les deuils des ruptures affectives douloureuses

Brigitte Allain-Dupré explique qu’on ne peut remplacer un/une ex-partenaire au pied levé, sans réfléchir, sans avoir fait les comptes avec la précédente histoire et oser reconnaître ce qui nous appartient dans cette rupture. Pour cela, il faut du temps.

Le temps du deuil de la relation qui s’est terminée est aussi un temps d’acquisition d’une nouvelle autonomie. On peut découvrir qu’on est plus solide qu’on ne le pensait et que le besoin de l’autre n’est pas si fort. Dans ce temps de reconstruction, on accepte qu’on peut désirer aimer et être aimé dans une démarche de respect mutuel et d’égale dignité (sans chercher à sauver l’autre ou à être sauvé).

  • 6.Oser penser pour et par soi

Reprendre contact avec son vrai soi passe par des prises de conscience progressives en faisant l’expérience d’une vraie reconnaissance du sens et de la qualité qu’on peut donner à ses propres pensées et ressentis.

Une personne qui récupère une bonne estime de soi se donne le droit de penser, de désirer, de ressentir, d’associer pensée et intuition/ ressentis. Elle retrouve pour elle-même les valeurs de protection parentale qui lui ont manqué et apprend à les mettre en œuvre. Cela passe par le fait d’avoir confiance en son corps, en ses émotions et d’accepter que le besoin d’autonomie n’exclut pas le besoin de proximité relationnelle (et inversement). Nous pourrons alors nous engager dans des relations de dépendance consenties, dans une démarche de souplesse relationnelle.

Prendre soin de nos parts intérieures vulnérables

Quand nous ignorons qu’il existe en nous un enfant qui est bon et digne d’amour parce que nos parents n’ont pas su veiller sur notre santé et notre sécurité, il y a peu de chances pour que nous sachions prendre soin de nous-mêmes sur le plan physique, affectif ou financier. – Margaret Paul

Margaret Paul, autrice de l’ouvrage Renouez avec votre enfant intérieur, nous incite à nommer nos qualités, en décrivant les actes qui permettent de soutenir et illustrer ces qualités, en les regardant avec objectivité, en dehors du regard à l’époque des parents, des frères/ soeurs, des enseignants ou des amis. Nous pouvons nous mettre en contact avec les émotions que nous ressentons quand nous nous disons des mots gentils, quand nous nous donnons des signes de reconnaissance positifs.

Ces sensations et émotions peuvent être douloureuses, difficiles à exprimer. Ces émotions peuvent être de la colère ou de la tristesse.  Colère contre l’entourage qui n’a pas su valoriser et soutenir dans le passé; tristesse d’avoir été négligé, de s’être senti seul si longtemps. Nous aurons également tendance à nier nos qualités, en les minimisant, en relevant ce qui ne va pas (les défauts, les erreurs, les échecs, les manques) plutôt que ce qui va (les qualités, les succès, les actes positifs effectués envers les autres…). Nous pouvons alors nous accorder de l’auto-compassion en nous réconfortant, en acceptant la colère comme légitime car cette émotion répare et restaure la dignité face à la négligence et à la maltraitance. Nous n’avons pas mérité les humiliations, les retraits d’amour ou la négation de nos émotions.

Cela prend du temps d’être à l’écoute de nos besoins, de nous accorder du temps pour les choses que nous aimons et qui nous donne l’impression d’être pleinement vivant, en lien avec les autres et le monde (par exemple, faire de la musique, peindre, s’engager dans une association défendant une valeur qui lui tient à coeur…).

Nous pouvons nous adresser avec compassion à nous-mêmes comme les parents aimants et soutenants ou le partenaire que nous aurions aimé avoir dans le passé :

Tu ne seras plus jamais seul : je serai toujours là pour toi.

Je suis désolée qu’il n’y ait eu personne pour toi, ce n’était pas ta faute.

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Sources :

S’affranchir des dépendances affectives : briser ses chaînes et revivre de Brigitte Allain-Dupré (éditions Leduc.s)

Vaincre la codépendance de Melody Beattie (éditions Pocket)

Renouez avec votre enfant intérieur de Margaret Paul (éditions Le Souffle d’Or)

Livres disponibles en librairie, en médiathèque ou sur internet.