Le “non” des enfants en dit long.

Le non des enfants

Crédit illustration : freepik.com

 

Dans son livre Développer l’Estime de Soi de Son Enfant : les clés d’une éducation bienveillante, Petra Krantz Lindgren propose de comprendre ce qui se cache derrière le non des enfants afin de respecter leur volonté sans pour autant faire une croix sur nos propres besoins de parents.

Elle nous rappelle que, derrière chaque non, se cache un besoin (ceci est valable pour les adultes comme pour les enfants d’ailleurs !). Les enfants communiquent rarement leurs besoins de manière claire et concrète (la plupart des adultes en sont également incapables d’ailleurs). Cette simple affirmation nous invite à être prêt à écouter le besoin de l’enfant qui dit non et en tenir compte.

Par exemple, un enfant à qui son parent demande de ranger peut répondre : “Mais pourquoi je dois toujours ranger ? J’ai travaillé toute la journée à l’école, j’ai bien le droit de me reposer un peu !”. Le parent qui raisonne en termes de besoins peut décoder cette réponse et la traduire en besoins : “Oh, je vois, tu as besoin d’un temps de repos. Là tout de suite, tu as envie de te détendre et d’être tranquille.”. En général, un enfant qui entend ce discours dans la bouche de son parent (plutôt que des critiques ou des menaces) peut se détendre car il se sent rejoint et compris.

Une fois que le parent a reflété à l’enfant ce qu’il a compris de ses besoins, deux options sont possibles :

  1. un changement de besoin a lieu chez le parent car ce dernier comprend que le besoin de repos de l’enfant est plus important que son propre besoin d’ordre;
  2. aucun changement de besoin n’a lieu : le besoin d’ordre du parent reste prioritaire pour lui.

Un arrangement gagnant/ gagnant peut être trouvé et le parent doit en être à l’origine car il a plus d’expérience et de maturité émotionnelle : “D’accord. Je comprends que tu aies besoin de te reposer. En même temps, je tiens à ce que le salon soit rangé. Comment est-ce que nous pourrions faire pour que nous soyons satisfaits tous les deux ?”. Ce type de question ouverte (dont la formulation n’est pas figée et doit être adaptée avec des mots personnels témoignant d’une authenticité)  témoigne de la volonté du parent de respecter l’intégrité de l’enfant autant que la sienne. Il n’y a pas de place pour la lutte de pouvoir.

Selon l’expérience que la famille a de la pratique de ce type d’arrangement, l’enfant  peut formuler ses propres propositions ou le parent peut en être à l’initiative pour permettre à l’enfant de choisir ou de rebondir pour en formuler d’autres :

  • Je pourrais pousser toutes mes affaires dans un coin du salon et tu ne les verras pas.
  • Je pourrais ranger quand ma série sera finie.

L’idée est de procéder par tâtonnement, propositions et contre-propositions pour aboutir à un arrangement qui convienne aux deux parties.

Des objections fréquentes aux arrangements gagnant-gagnant entre parents et enfants

Les enfants ne pensent qu’à leurs propres besoins

Petra Krantz Lindgren estime que les enfants ont envie de coopérer quand ils se sentent respectés et compris. S’ils ne pensent qu’à leurs propres besoins, c’est qu’ils n’ont pas suffisamment confiance dans la relation pour être convaincus que le parent tiendra sa parole ou qu’ils se vengent d’atteintes passées à sa dignité. Certains enfants peuvent également manquer d’expérience et de pratique et ne savent pas comment s’y prendre pour concilier leurs propres besoins et ceux des autres membres de la famille. Cela peut prendre du temps d’apprendre de nouvelles manières de communiquer en famille.

Ainsi, Petra Krantz Lindgren rappelle que les arrangements gagnant/ gagnant en famille ne peuvent émerger que dans des relations familiales équidignitaires.

Si des résistances à ce type de fonctionnement émergent, les parents restent responsables de la qualité de la relation. Ils peuvent choisir d’essayer de (r)établir des relations équidigniatires au sein de la famille (et cela peut passer par la reconnaissance des erreurs passées et des excuses sincères pour le bafouement passé de la dignité des enfants).

S’intéresser à la relation dans son ensemble, c’est s’intéresser :

  • au respect mutuel (les parents respectent-ils les sensations de l’enfant comme sa satiété ou le forcent-ils à manger ? les parents respectent-ils les affaires de l’enfant ou lisent-ils son journal intime ? …)
  • à l’intérêt sincère et inconditionnel que les parents portent aux enfants en dehors de toute attente (notes scolaire, résultats sportifs, obéissance…)
  • à l’empathie portée aux émotions de l’enfant
  • à la qualité de l’attachement qui unit parents et enfants (et dont les parents sont responsables)
  • au langage utilisé par les parents quand ils s’expriment (le langage est-il personnel, authentique, sincère et vulnérable ou se cache-t-il derrière des “il faut”/ “c’est comme ça” ?)

 

Cela prend trop de temps : on n’a pas que ça à faire !

Petra Krantz Lindgren affirme que l’argument du temps ne tient pas la route.

Il s’agit de prendre le temps de dire à l’enfant ce qui compte pour soi et s’intéresser à ce qui compte pour lui. Si l’on estime ne pas en avoir le temps, il est à mon avis urgent de réfléchir à la manière dont on choisit de disposer de son temps.

Rappelons qu’on gagne du temps en faisant attention aux besoins des autres car un enfant qui se sent respecté et a la certitude que ses besoins seront pris en compte choisit la plupart du temps de coopérer. Ce dernier n’a en effet pas besoin de se défendre et d’activer son instinct de contrevolonté. perdre du temps, c’est souvent en gagner au final !

Il faut bien que les enfants obéissent, c’est abusé quand même !

Il existe des situations où nous n’avons effectivement pas le temps de trouver des accords (par exemple, face à un enfant qui s’apprête à traverser la route sans regarder). Toutefois, rester respectueux envers l’enfant est possible :

  • ne pas critiquer l’enfant (en lui disant qu’il est bête ou fou),
  • ne pas le culpabiliser ou lui donner un sentiment de honte,
  • écouter l’enfant avec empathie quand il exprime ses sentiments et ses besoins (ex : Je vois que tu es fâché/ triste/ que tu as eu peur. J’imagine que tu aurais préféré…”).

Dans un deuxième temps, le parent peut expliquer pourquoi il a choisi de s’imposer et s’excuser et/ou demander à l’enfant comment il s’est senti sur le coup.

Cela peut être tentant de prétexter l’importance de protéger l’enfant ou les besoins des autres et ainsi faire l’impasse sur le principe d’équidignité. Or, plusieurs risques y sont associés. Avant tout, une telle tendance ronge la confiance et le respect mutuels de la relation. Puisque l’envie de coopérer y trouve son origine, la probabilité que l’enfant choisisse de coopérer par la suite risque de diminuer. C’est pourquoi je vous conseille de bien peser les différents besoins les uns par rapport aux autres avant d’avoir recours à votre pouvoir en tant qu’adulte. – Petra Krantz Lindgren

 

…………………………………………………………………………………………

Source : Développer l’Estime de Soi de Son Enfant : les clés d’une éducation bienveillante de Petra Krantz Lindgren (éditions Eyrolles). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

Commander Développer l’Estime de Soi de Son Enfant sur Amazon sur Decitre, sur Cultura ou sur la Fnac