Ceci est notre post-partum : défaire les tabous autour des mois suivant l’accouchement et dévoiler la souffrance des jeunes mères

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Présentation de l’éditeur

Après #MonPostPartum, le livre qui libère la parole des femmes sur l’après-accouchement.

Pour une femme, la naissance d’un bébé est un événement que la société qualifie de « magique », procurant un « bonheur immense et immaculé ». Si c’est en partie vrai, c’est bien vite oublier la réalité de la maternité et ses plus sombres nuances. C’est passer sous silence les difficultés et les remous des suites de couches. C’est cacher la douleur, la souffrance – physique ou psychique – qu’éprouvent les femmes dans les jours, les semaines, les mois, qui suivent l’arrivée de leur enfant.
Le post-partum, cette période qui débute après l’accouchement mais dont la durée reste indéterminée selon les définitions et le vécu de chacune, est le grand tabou de la maternité. Illana Weizman dénonce l’invisibilité d’une expérience pourtant commune à des millions de femmes à travers le monde, et en décrypte les origines socio-culturelles. Elle encourage les femmes à s’informer, à partager leurs expériences, et avance des propositions politiques pour une meilleure prise en charge du post-partum. S’appuyant sur les nombreux témoignages du hashtag #MonPostPartum et sur ses qualités d’analyse sociologique, elle normalise les réalités du post-partum dans un manifeste libérateur.

L’autrice : Illana Weizman est née en 1984. Doctorante en sociologie des médias à l’université de Tel Aviv, elle s’intéresse à la construction identitaire et au militantisme en ligne ainsi qu’aux questions féministes. Elle est co-créatrice de la campagne #MonPostPartum. Cet essai est son premier livre.

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Cet ouvrage est organisé autour de 5 chapitres :

  1. Qu’est-ce que le post partum ?
  2. Une société hermétique à la douleur des femmes
  3. L’indécence du corps post-partum
  4. Domination masculine intériorisée et compétition maternelle
  5. Pistes politiques pour un meilleur vécu post-partum et une parentalité égalitaire

Dans ce livre, Illana Weizman dénonce les non dits qui entourent la période du post-partum. Elle estime que cette phase que traversent les femmes qui viennent d’accoucher est une “boîte noire” et que le manque d’informations au sujet des séquelles physiques et psychologiques liées à la naissance d’un bébé est nocif pour les mères qui se retrouvent “inquiètes et désemparées” face à des difficultés qu’elles n’avaient pas anticipées. 

Le plus difficile est d’être dans le flou et de ne pas savoir que ce qu’on vit est normal ni combien de temps cela va durer. Illana Weizman regrette que la plupart des femmes enceintes ne savent pas qu’elles saigneront pendant des semaines (et de façon parfois très abondante) et que les contractions de l’utérus perdureront après l’accouchement. Même si ces symptômes ne touchent pas toutes les femmes avec la même intensité et que chaque corps est différent, se préparer à cette éventualité permet d’aborder le post-partum plus sereinement.

Il n’y a rien de plus effrayant que de vivre une expérience douloureuse et transformatrice tout en ignorant ses manifestations. […] Qu’est-ce qui est alors le plus effrayant ? Savoir avant d’accoucher que des douleurs et des gênes vont s’installer et dans quelle mesure ? Ou bien l’apprendre sur le tas et se sentir sale, anormale, ou, pire, être persuadée que quelque chose de grave pour sa santé se produit ?  – Illana Weizman

Illana Weizman liste les symptômes physiques les plus courants que connaissent les femmes lors de la période du post-partum :

  • les lochies (écoulement de sang qui peut être excessif et prolongé et qui implique le port de couches de protection ou de serviettes épaisses)
  • les tranchées (contractions utérines violentes et douloureuses qui aident l’utérus à retrouver sa place et sa taille d’avant la grossesse)
  • les hémorroïdes
  • la montée de lait qui peut engendrer des douleurs (seins rouges, durs) pouvant aller jusqu’à l’infection sous forme de mastite quand le lait n’est pas expulsé
  • l’inconfort périnéal (pesanteur dans le bas ventre)
  • l’incontinence urinaire (fuites)
  • les douleurs liées à l’épisiotomie ou à la césarienne
  • un état de fatigue extrême
  • des maux de dos

Illana Weizman dénonce le fait qu’on parle couramment du “baby blues” pour désigner le bouleversement hormonal dans les jours suivant l’accouchement mais que ce terme ne reflète pas l’intensité de la déstabilisation émotionnelle qui touchent de nombreuses mères. La dépression post partum touche entre 10% et 20% des nouvelles mères. Illana Weizman parle d’un “véritable problème de santé publique” car cette forme de dépression est souvent vécue dans la honte et la solitude par les nouvelles mères.

Les signes qui peuvent alerter sur la présence d’une dépression post partum ressemblent à :

  • des mouvements dépressifs : le discours de la jeune mère est envahi de tristesse avec une dévalorisation d’elle-même et de la culpabilité;
  • des angoisses diffuses;
  • des troubles du sommeil persistants;
  • une inquiétude grandissante face aux responsabilités à assumer;
  • des crises de larmes;
  • une impossibilité à ressentir de la joie depuis l’arrivée de l’enfant et des regrets.

Ainsi, Illana Weizman milite pour que cette réalité du post-partum qu’on cherche à masquer soit énoncée. Elle parle d’une “société maltraitante” incapable d’offrir une réponse empathique et un accompagnement adapté face aux peines physiques et psychologiques qui touchent les femmes en post-partum. Les femmes qui viennent d’accoucher ont besoin qu’on s’occupe d’elles, autant que de leur bébé. Il est important de permettre aux femmes d’exprimer leur mal-être et de changer les représentations culturelles autour de la maternité qui ne serait “que du bonheur”. La bonne santé du bébé ne devrait pas être un prétexte pour mettre sous le tapis les souffrance de la mère.

Définir le post-partum comme la simple période des six semaines suivant l’accouchement, c’est le réduire aux symptômes physiques alors qu’il serait bénéfique et nécessaire pour les jeunes mères de mettre l’accent aussi sur les conséquences psychologiques. En effet, l’adaptation psychologique et sociale des nouvelles mères se fait sur le long terme (des mois et même parfois des années). Certains chercheurs estiment qu’il faudrait dans l’idéal douze mois de récupération postnatale au niveau physique et émotionnel en raison des changements physiques, hormonaux et de la mutation identitaire qu’une naissance provoque.

Illana Weizman propose de définir le post-partum par les six mois suivant l’accouchement, avec deux phases distinctes :

  • de la naissance aux 40 jours suivants : un post-partum à haut risque qui mérite un suivi pluridisciplinaire des femmes ayant accouché (incluant une rééducation physique mais aussi un suivi psychologique et de l’aide domestique);
  • des 40 jours aux 6 mois suivant l’accouchement : un suivi en fonction des besoins des mères avec un point de contact facile vers tous les professionnels de la santé.

Il n’y a rien de plus effrayant que de vivre cette expérience transformatrice qui caractérise le post-partum sans y avoir été préparée et de se résigner à s’auto censurer pour coller à la représentation sociale de la mère épanouie et folle de joie. Nous avons besoin de battre en brèche les mythes qui entourent la maternité, de proposer des représentations sociales plus proches de la réalité. C’est important pour les mères, pour les bébés, mais aussi pour l’entourage (notamment les pères) qui sont incapables d’être des soutiens solides s’ils ignorent la réalité du post-partum.

Ce livre est un plaidoyer pour briser les tabous au sujet des difficultés et souffrances liées à la condition de mère. Il dénonce l’injonction sociale qui pèse sur les femmes à devenir mères car Illana Weizman estime que nous vivons dans une société où règne une injonction à devenir mères pour les femmes. Toutefois, l’autrice regrette qu’il ne suffise pas pour une femme de remplir son rôle de reproductrice pour être laissée en paix : il lui faut aimer ce rôle, le “surjouer”, le “surperformer“. Tout se passe comme s’il fallait ne jamais s’en plaindre : ni pendant la grossesse, ni pendant le post-partum (les mois suivant l’accouchement), ni se plaindre de la maternité prise comme un tout. La punition sociale est élevée pour les femmes qui osent évoquer leurs difficultés (et parfois leurs regrets) : “Être enceinte, ce n’est pas être malade”, “Tu l’as voulu ce gosse, il faut bien faire avec maintenant, personne ne t’a obligée”, “Il fallait réfléchir avant d’en faire encore un autre/ de les faire si rapprochés”, “De nos jours, les femmes sont faibles, elles se plaignent pour un rien”.

Il ne s’agit pas de nier l’amour maternel que la plupart des femmes ressentent (parfois pas immédiatement) pour leur bébé ni de dire que la maternité, ce n’est que du malheur et de la souffrance. Il s’agit plutôt de décrire toute l’ambivalence de l’expérience de la maternité, et en particulier les mois du post-partum. Les femme qui ont été mères il y a déjà quelques temps et les toutes jeunes mères ont tendance à romancer leur expérience de la maternité et à ne pas dévoiler leurs états d’âme, leurs irrésistibles envies de pleurer, leurs émotions difficiles, leurs douleurs physiques, leur fatigue extrême et leur sentiment de solitude, voire d’abandon, profond. Illana Weizman parle de “travestissement de la réalité“, ” de réécriture”, de “déni des souffrances” car enfanter est à tel point vu comme la réalisation de sa destinée d’une femme que parler des difficultés qui vont avec est “indigne et inaudible“. Les femmes se conforment à ce qui est attendu d’elles pour éviter les conséquences sociales que leurs témoignages pourraient entraîner (critiques, jugement, incompréhension, rejet). Elles peuvent également avoir peur qu’on leur retire leur bébé du fait qu’elles soient considérées comme des mauvaises mères, des mères incompétentes, voire dangereuses pour leur enfant.

Certaines réactions de femmes au sujet de jeunes mères qui témoignent de leurs difficultés maternelles sont comme des rappels à l’ordre, à l’ordre social. Cela se traduit par des sentences du type  “Vous devriez avoir honte de vous exposer ainsi, c’est impudique”,”On est passé par là et on n’en est pas morte”, “La génération actuelle est bien fragile”, “Personne ne vous a obligé à avoir un enfant, il faut assumer maintenant”.

L’injonction à devenir mère entraîne un autre effet nocif sur les femmes : de là, naît une rivalité entre les femmes fécondes et celles qui ne sont pas en capacité physique d’enfanter alors qu’elles le souhaiteraient. Il en résulte que les femmes qui ont la chance d’accéder au statut de mère sont contraintes au silence au sujet de leurs souffrances, tant physiques que psychologiques. Parce qu’il y a pire destin que de connaître des difficultés maternelles (celui de ne pas pouvoir devenir mère), les mères en souffrance ne sont pas légitimes pour parler d’elles. Illana Weizman remarque pourtant que la souffrance des femmes en post-partum ne vient pas faire concurrence à celles des femmes infertiles ou dont le conjoint est infertile. C’est comme si la société ne pouvait pas reconnaître toutes les souffrances des femmes en lien avec la maternité : à la fois celle liée à l’impossibilité d’avoir un enfant pour une femme qui le désire ou celle d’une jeune mère en dépression post-partum; celle d’une femme qui vient de subir un deuil périnatal ou celle d’une mère de famille nombreuse en situation d’épuisement parental.

Dans un système qui porte la maternité aux nues, les souffrances de femmes en période de post-partum sont immédiatement invalidées puisqu’elles ont eu la “bonne fortune” d’être mères : se plaindre d’une expression de la maternité, c’est trahir son genre. – Illana Weizman

Illana Weizman nous invite avec son livre à prendre la parole autour de nos expériences intimes : parler de toutes nos difficultés à être mères, nous réapproprier nos corps souffrants, changeants et affaiblis de jeunes mères. Parler des douleurs physiques du post-partum, faire part du regret d’être mère qui peut émerger, affirmer que la maternité est une expérience beaucoup plus nuancée que “juste du bonheur”, témoigner de la difficulté à aimer un bébé… ce n’est pas trahir les femmes ou faire du mal aux enfants, c’est se donner la possibilité de sortir de cet état de survie, c’est permettre aux autres femmes d’en faire de même et aux futures mères de mieux savoir à quoi s’attendre.

Les mythes entourant la maternité découlent directement de l’assignation privilégiée des femmes à la fonction reproductive, une tâche sociale vue comme un passage obligatoire pour compléter sa destinée de genre. Et, parce que ce destin est écrasant et surpuissant, la glorification qui l’entoure est écrasante et surpuissante. La fable de la maternité est un récit de sacrifice et d’abnégation dans lequel les femmes trouveraient l’euphorie. Quel cynisme que d’octroyer à des valeurs d’oubli de soi l’épanouissement personnel ! – Illana Weizman

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Ceci est notre post-partum : défaire les mythes et les tabous pour s’émanciper de Illana Weizman (éditions Marabout) est disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet.

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