Parents : 2 conditions pour réguler la colère en situation de crise

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Dans leur livre Les compétences psychosociales : manuel de développement, Béatrice Lamboy, Rebecca Shankland et Marie-Odile Williamson estiment qu’il existe deux conditions préalables à la régulation des émotions en situation de crise (conditions valables tant pour les adultes que pour les enfants). En parallèle, il peut être utile de se souvenir que les émotions sont provoquées par un déclencheur (perçu par un ou plusieurs de nos cinq sens), ce déclencheur signalant un besoin insatisfait en nous (impuissance, injustice, irrespect, frustration, effraction de l’espace vital…).

Condition préalable n°1 : s’engager à ne pas agir dans le “rouge”

Cette condition est une sorte de bonne résolution envers soi-même mais aussi envers autrui. Cela suppose d’avoir conscience des conséquences problématiques (pour autrui et pour soi) que peut provoquer une action sous l’emprise d’une colère forte (mots prononcés et regrettés ensuite, gestes violents, décisions inappropriées…). Ce recours aux couleurs permet d’identifier quand le risque de violence est grand : un dégradé de couleur du vert au rouge par exemple permet de se situer (vert = calme, jaune = c’est dérangeant, orange = c’est irritant et ça chauffe, rouge = ça va déborder car c’est bouillant).

Un thermomètre peut aider les enfants à visualiser ce principe :

réguler colère en crise

 

 

 

Condition préalable 2 : écouter ses émotions comme habitude quotidienne (une hygiène émotionnelle)

Nous pouvons prendre l’habitude, tout au long de la journée, de faire attention à ce que nous ressentons dans une démarche de curiosité et d’auto-observation non jugeante. Il s’agit juste d’accueillir ce qui est, même quand c’est douloureux, tout en sachant que les sensations et émotions difficiles peuvent être désagréables mais qu’elles ne sont pas dangereuses. Elles racontent juste quelque chose sur mes besoins et mes valeurs, sur mes aspirations. A cet effet, nous pouvons nous demander plusieurs fois par jour :

  • comment je me sens maintenant ?
  • comment je me sens maintenant quand cette personne me dit cela ou fait cela ?
  • quand ai-je tendance à m’énerver ?
  • comment cela se passe-t-il en moi quand je commence à m’énerver ?

Nous pouvons proposer ce petit travail d’introspection aux enfants régulièrement, sans en faire une obligation.

 

La régulation de la colère en situation de crise en deux temps

Une fois que nous avons adopté l’intention de réguler notre colère pour ne pas la laisser déborder en violence mais pour utiliser son énergie au service de nos besoins, nous pouvons activer des techniques efficaces de régulation émotionnelle.

D’abord, faire une pause

Ce premier temps de pause est très important. Quand nous sentons que la colère monte et que nous risquons de perdre le contrôle, il est nécessaire de s’arrêter. Cette compétence suppose de savoir reconnaître les signes annonciateurs de tension dans le corps. Une question clé peut nous y aider : comment ça fait dans mon corps quand « je suis dans le rouge » ? où est-ce que ça se passe ?

Pour aller plus loin : Intelligence émotionnelle et résilience : construire un vocabulaire riche autour des sensations, bénéfique tant pour les adultes que pour les enfants 

Ensuite, activer une technique apaisante 

Pour passer du rouge à l’orange ou au vert, il existe plusieurs techniques de régulation émotionnelle, de plusieurs natures.

Techniques cognitives

  • Réorienter l’attention : il s’agit de porter l’attention sur quelque chose d’agréable.
    • Porter l’attention sur une pensée ou une image mentale. Ex. : je compte jusqu’à 10, je fredonne une chanson que j’aime dans ma tête, je pense à quelque chose d’agréable, je visualise une image positive…
    • Modifier l’attention en modifiant l’environnement immédiat. Ex. : je change de pièce, je vais dehors, je parler à quelqu’un d’autre, je fais une activité plaisante…
  • Réévaluer la situation : bien comprendre la nature des émotions permet de recadrer les pensées (une émotion est provoquée par des besoins insatisfaits qui menacent la survie et par la perception/interprétation de la situation (fatigue, stress, croyances…). En percevant nos besoins, notre état interne et en modifiant notre perception de la situation, nous pouvons atténuer l’intensité de la colère.
  • Imaginer les conséquences nocives d’un passage à l’acte (sur soi et sur les autres)

Techniques psychocorporelles

  • Se doter de petits outils de respiration
  • Savoir faire preuve de pleine attention au moment présent
    • Détourner l’attention de l’extérieur pour la tourner vers l’intérieur : observer ce qui se passe en soi (qu’est-ce que je ressens ? quelles sont me pensées ? mes sensations ? mes émotions ?)
    • Pendant une minute entière, ne rien faire d’autre que se concentrer sur la respiration :
      • commencer par inspirer et expirer lentement.
      • compter jusqu’à quatre en inspirant puis compter jusqu’à quatre en expirant

      Naturellement, l’esprit va essayer de s’évader; il s’agit alors de remarquer les pensées et idées qui émergent et de les laisser passer (“Tiens, je pense à… et je reviens à mon inspiration”).

  • Observer consciemment
    • Choisir un objet dans l’environnement immédiat (cela peut être une fleur, un insecte, une partie du corps, une photo…).
    • Se concentrer sur cet objet en le regardant intensément. L’idée est de voir cet objet comme si c’était la première fois, comme un extra terrestre découvrirait des objets inconnus en l’observant sous toutes ses coutures (couleurs, taille, matière, dimension, chaleur, masse…)
    • Essayer d’isoler et d’identifier les différents aspects de l’objet, d’abord de manière uniquement visuelle puis avec les autres sens (le toucher, l’ouïe, l’odorat…)

Techniques relationnelles

  • Exprimer les émotions via des messages-je (parler de soi avec des mots : ce que J’ai ressenti, ce que J’ai fait sous l’emprise de la colère et ce que JE ne voulais pas faire et pour laquelle JE m’excuse
    • Je suis vraiment dérangé par ce qui se passe maintenant.
    • Quand je vois tout ce désordre, je suis très en colère. 
    • Nous sommes tous les deux trop énervés et j’ai l’impression que ça ne mènera à rien. Reparlons-en plus tard. 
    • J’étais vraiment fâché, je ne pensais pas ce que je vous ai dit. Je vous présente mes excuses et m’engage à ne pas réitérer ce type de comportement. 

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Source : Les compétences psychosociales : manuel de développement de Béatrice Lamboy, Rebecca Shankland et Marie-Odile Williamson (éditions De Boeck Supérieur).

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