Comment exprimer une colère saine ?

Comment exprimer une colère saine

Il est possible de se doter d’une manière bénéfique d’exprimer une colère saine en prenant conscience du circuit de la colère saine et légitime.

Le refoulement de l’émotion de colère détériore la qualité des relations entre les personnes, et notamment entre des personnes qui s’aiment dans les couples et les familles. Les petits mécontentements non traités, les micro frustrations – mais répétées – non exprimées peuvent se transformer et prendre des ampleurs destructives : violence verbale (injure, humiliation), violence physique, détresse psychologique (pouvant aller jusqu’à des conduites addictives ou une phase dépressive), douleurs physiques ou encore transferts des problèmes d’un pan de la vie à l’autre (la vie professionnelle débordant sur la vie personnelle ou inversement, pouvant mener à un licenciement).

Les 8 étapes du circuit de la colère saine et légitime.

1.Un événement, le plus souvent inattendu et désagréable, survient.

2.Cet événement génère une sensation corporelle comme : des frissons sur les tempes, des tremblements, l’estomac noué, une sensation de chaleur aux joues, un étourdissement, une tension dans les mâchoires ou les poings. Ces sensations dans le corps peuvent s’accompagner de mouvements ou gestes (yeux au ciel, tête qui dit non, soupirs, pleurs, cris…), et par des images mentales (on se voit crier ou taper, on se souvient des torts reprochés à l’autre dans le passé…) ainsi que des pensées rapides et automatiques (“il m’énerve, je vais lui faire payer”, “elle recommence comme d’habitude, elle me cherche”, “je n’en peux plus, je vais le frapper”…)

3.La pensée rationnelle, différente des pensées rapides et automatiques, se connecte aux sensations : accueil et nomination de ces sensations par la petite voix  interne (“je sens que je chauffe, j’ai la mâchoire crispée, c’est de la colère, je la sens monter en moi, j’ai envie de hurler, je dirais qu’elle est à 6/10“).

4.Si la colère est sourde, intense, prête à exploser, il peut être utile d’avoir recours à des stratégies de retour au calme. L’énergie de colère doit pouvoir trouver un moyen d’expression et, parfois, les mots ne suffisent pas. On peut se doter d’une sorte de thermomètre mental pour reconnaître les émotions qui pourraient nous submerger et pour nous réguler quand nous sommes “dans le rouge”.

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Pour passer du rouge à l’orange ou au vert, il existe plusieurs techniques de régulation émotionnelle, de plusieurs natures. Retrouver son calme passe par la prise de distance et par la lenteur.

-Techniques cognitives

    • Réorienter l’attention : il s’agit de porter l’attention sur quelque chose d’agréable.
      • Porter l’attention sur une pensée ou une image mentale. Ex. : je compte jusqu’à 10, je fredonne une chanson que j’aime dans ma tête, je pense à quelque chose d’agréable, je visualise une image positive…
      • Modifier l’attention en modifiant l’environnement immédiat. Ex. : je change de pièce, je vais dehors, je parler à quelqu’un d’autre, je fais une activité plaisante…
    • Réévaluer la situation : bien comprendre la nature des émotions permet de recadrer les pensées (une émotion est provoquée par des besoins insatisfaits qui menacent la survie et par la perception/interprétation de la situation (fatigue, stress, croyances…). En percevant nos besoins, notre état interne et en modifiant notre perception de la situation, nous pouvons atténuer l’intensité de la colère.
    • Imaginer les conséquences nocives d’un passage à l’acte (sur soi et sur les autres)

-Techniques psychocorporelles

    • Se doter de petits outils de respiration
      • Réaliser 5 à 10 grandes respirations abdominales, souffler par la bouche longuement (expirations plus longues que l’inspiration)
    • Savoir faire preuve de pleine attention au moment présent
      • Détourner l’attention de l’extérieur pour la tourner vers l’intérieur : observer ce qui se passe en soi (qu’est-ce que je ressens ? quelles sont me pensées ? mes sensations ? mes émotions ?)
      • Pendant une minute entière, ne rien faire d’autre que se concentrer sur la respiration :
        • commencer par inspirer et expirer lentement.
        • compter jusqu’à quatre en inspirant puis compter jusqu’à quatre en expirant

        Naturellement, l’esprit va essayer de s’évader; il s’agit alors de remarquer les pensées et idées qui émergent et de les laisser passer (“Tiens, je pense à… et je reviens à mon inspiration”).

    • Observer consciemment
      • Choisir un objet dans l’environnement immédiat (cela peut être une fleur, un insecte, une partie du corps, une photo…).
      • Se concentrer sur cet objet en le regardant intensément. L’idée est de voir cet objet comme si c’était la première fois, comme un extra terrestre découvrirait des objets inconnus en l’observant sous toutes ses coutures (couleurs, taille, matière, dimension, chaleur, masse…)
      • Essayer d’isoler et d’identifier les différents aspects de l’objet, d’abord de manière uniquement visuelle puis avec les autres sens (le toucher, l’ouïe, l’odorat…)

 

5.La colère saine est exprimée avec des mots car l’expression à la bonne personne et à la bonne intensité libère l’énergie contenue en soi. Cela peut passer par des formules qui contiennent JE (pour ne pas accuser l’autre) et qui dissocient l’émotion de l’entité personnelle : “Je ressens de la colère, là tout de suite. En fait, cette colère est tellement grosse en moi que je dirais que c’est de la rage.” Si on s’en sent capable et qu’on a dénoué les fils de ce qui se passe en soi, on peut ajouter une demande : “J’ai besoin de savoir que mes efforts pour prendre soin du foyer comptent dans cette maison et je voudrais que tu (ranges tes affaires/ arrives à l’heure pour laquelle tu t’étais engagé/ nettoies derrière toi quand tu rentres avec tes chaussures terreuses…)”

6.Une expression de ce type (sans crier, sans injurier mais en ne minimisant pas non plus l’intensité de l’émotion) est une information pour les autres. Cela ouvre une porte pour traiter l’événement car les autres ont des indications sur ce qu’ils peuvent faire pour réparer.

7.En parallèle, se rappeler que les autres commettent des maladresses parce qu’ils ont leurs propres préoccupations ou alors qu’ils sont en cours d’apprentissage (comme c’est le cas pour les enfants) permet de recadrer les pensées et d’atténuer les réactions émotionnelles.

8.Si l’événement est récurrent et sujet à friction (dans le couple, dans la famille ou entre collègues par exemple), il est possible de prendre une sorte de rendez-vous pour trouver des solutions et anticiper les problèmes avant même que la colère n’émerge. Il s’agit de noter un moment précis, afin que l’un ou l’autre ne se défile pas en remettant toujours à plus tard ce type de résolution de problèmes. Ainsi, si un sujet de friction familial est le fait que les enfants rentrent dans la maison avec leurs crampons pleins de terre après le foot, on pourrait imaginer que les parents mettent un panneau sur la porte d’entrée en rappelant avec humour et amour la règle (exemple : on laisse les chaussures dehors et on rentre pieds nus ou en chaussons dans la maison). Un petit mot rappelant l’attachement et un dessin illustratif (ici, on pourrait imaginer un arbitre qui donne un carton jaune) pourra adoucir cette règle : “Les enfants, je vous aime fort et j’aime aussi la règle qui dit : ….

 

Aborder la colère de cette manière ne garantit pas que les autres coopéreront. Il se peut qu’un enfant ou un conjoint ne prenne pas en compte les émotions exprimées ou ne veuille pas s’embarrasser d’une résolution de problèmes parce qu’il n’a rien à y gagner (si ce n’est plus de charge en termes de tâches ménagères ou d’efforts à fournir). La responsabilité de tous les protagonistes est engagée : celle qui consiste à signaler la colère pour celui qui l’éprouve, mais aussi celle qui consiste à adopter une démarche négociatrice pour celui qui en accuse réception (et, en premier lieu, présenter des excuses). Les relations humaines ne sont pas une science exacte.

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